Histoire de La Rochette

Livre histoire

L'origine de La Rochette remonte à la préhistoire, la première occupation humaine se situant près du pont du Pet-au-diable.

En effet, en amont, de nombreux objets ont été trouvés lors de dragages effectués entre 1934 et 1936 pour creuser le lit de la Seine jusqu'à la couche calcaire : des haches de silex de l'époque néolithique et d'origine bretonne, des lames d'épée et des couteaux de l'âge du bronze. Ces découvertes indiquent l'existence d'un gué qui servait de liaison entre les vieux chemins de Bière et ceux du plateau de Brie, transformés par la suite en voies romaines. Des hommes s'installèrent près de ce lieu de passage et sur le versant du coteau d'où coulaient de nombreuses sources. Ainsi naquit un hameau, il y a près de 8 000 ans.

L'histoire de La Rochette est intimement liée à celle de Melun. Dans le récit de la conquête des Gaules, en 54 av. J.-C., on peut lire que Labienus, lieutenant de l'empereur Jules César, débarqua ses troupes sur le chemin de Halage en amont de Melun, près de La Rochette.

Le document le plus ancien mentionnant l'existence de La Rochette date du Moyen Âge. En effet, une charte de 1047 nous apprend que les religieux du prieuré Saint-Sauveur de Melun attribuaient la fondation de leur couvent à Raynaud, fils du comte de Melun (contemporain de Robert le Pieux (996-1031), premier roi de France ayant eu sa résidence à Melun). Une donation de biens fonciers (églises et cimetières, le bourg, les voiries, les terres arables et les vignes, les bois, les moulins et les fours) devait permettre aux prêtres et aux moines de vivre des récoltes. On en trouve la liste dans la charte :

- l'église Saint-Ambroise avec ses propriétés et ses serfs ;

- le moulin de Rubelles ;

- le village d'Orgenoy et celui de La Rochette.

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La Rochette appartint donc au comte de Melun jusqu'au début du XIe siècle, puis revint au prieuré Saint-Sauveur de Melun.

Une autre charte, signée en 1170 par Louis VII le Jeune (1120-1180), donne plus de précisions sur La Rochette. Ce roi très pieux, qui séjournait souvent à Melun, fit construire le chœur de l'église Notre-Dame de Melun, et, dix ans avant sa mort, il songea à assurer l'avenir du prieuré Saint-Sauveur en le mettant sous la tutelle de la riche abbaye de Château-Landon.

Le rattachement de La Rochette à Château-Landon marque le début d'une ère de prospérité. C'est à cette époque, aux XIIe et XIIIe siècles, que l'église Saint-Sauveur de Melun et celle de La Rochette furent construites. Les moines du prieuré conservèrent la gestion de leurs biens, notamment la perception des dîmes (dixième partie de la récolte donnée au clergé) engrangées à La Rochette et la Varenne.

Cette période de prospérité est marquée aussi par une augmentation de la population. Pour faire face à ces nouveaux besoins en nourriture, les moines de Saint-Sauveur se mirent à défricher les terres afin d'accroître leur production de céréales. Mais ils se heurtèrent à l'opposition des paysans de La Rochette qui, affranchis (il n'y a plus de serfs en Île-de-France au XIIIe siècle), se révoltèrent car ils tenaient à conserver la jouissance des friches où ils avaient l'habitude de mener paître leur bétail.

En 1261, sous le règne de saint Louis, l'affaire fut portée jusqu'à la Cour de justice de Paris, qui rendit l'arrêt suivant :

« Le prieur pouvait cultiver ses friches ou en faire des étangs ou des vignes, mais non des pâturages pour ses animaux, ni y planter des bois, ni les clore afin que lorsque les récoltes seront enlevées, les habitants puissent y exercer la vaine pâture. »

Mais ces essais de cultures par les moines durèrent peu de temps car les terres étaient trop pauvres et trop proches de la forêt, donc exposées aux dégâts causés par les gibiers.

Progressivement, les paysans devinrent possesseurs de leurs terres en payant des redevances au prieuré Saint-Sauveur. Ils cultivaient des céréales aux différents lieux-dits du village (Pincevents, Pet-au-diable et vallée Colant, aujourd'hui Bois Coulant), mais aussi des vignes sur les coteaux, et des jardins. Cependant, l'élevage était encore plus important que la culture. En particulier, les porcs étaient menés dans les bois situés vers Bois-le-Roi, où ils étaient engraissés de glands, d'où le nom du lieu-dit « la Glandée ».

La région melunaise fut ruinée par la guerre de Cent Ans (1337 – 1453). En 1347, d'après une « Déclaration des biens du prieuré Saint-Sauveur à la Chambre des comptes de Paris », les moines de Saint-Sauveur, appauvris, ne pouvaient plus exercer leur droit de justice (ils devaient payer les officiers de justice). En 1366, les moines vendirent leurs dernières friches. En 1493, les religieux de Saint-Sauveur refusèrent de réparer l'église de La Rochette, desservie par l'un d'entre eux, en faisant constater qu'ils étaient étrangers à sa fondation.

Les landes, bois et friches non entretenus, retournèrent au domaine royal, à l'exception de deux petits fiefs, Olibon et Béthisy.

Jusqu'au XVIIIe siècle, les habitants dépendirent donc de petits seigneurs à qui ils payèrent des taxes et redevances. Ils versèrent aussi la taille, impôt royal. Pour sa collecte, La Rochette était rattachée à Farcy-lès-Lys (Dammarie-lès-Lys). Mais en 1755, à la demande des Rochettois, les deux communes furent séparées.

En 1753, M. Moreau, directeur des fermes du Roy, fit l'achat des deux fiefs et les défricha, ce qui fit à nouveau prospérer le village.

À la Révolution française, les biens du clergé furent déclarés « biens nationaux » et, à ce titre, mis en vente. M. Moreau, de La Rochette, put donc acheter les bois appartenant à l'abbaye du Lys (commune de Dammarie-lès-Lys) et limitrophes de sa propriété. Il agrandit ainsi son domaine et par conséquent la commune de La Rochette. En 1768, M. Moreau fut anobli. Il put ainsi ajouter à son nom celui de sa terre.

La population augmenta (125 habitants en 1783, 177 habitants en 1790) car les châtelains embauchèrent du personnel (jardiniers, cochers et domestiques) et, beaucoup d'entre eux s'installèrent à La Rochette. Après la Révolution, la population oscilla entre 176 et 222 habitants. Les bois de L'Ermitage furent vendus en lotissement par la famille La Rochette en 1925, à la mort du baron Armand. Des pavillons y sont construits. La commune s'étend alors jusqu'à Melun, sa population décuple et atteint près de 3 000 habitants en 1962.

Années  Nombre
d'habitants
1790 177
 1820  185
 1851  194
 1881  208
 1911 171
 1926  222
 1946 530
 1954  1172
1962 2958
1968 2877
1982 2992
1998 2791
2009 3005

 

Patrimoine

L'église

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L'église Notre-Dame de la Visitation est le bâtiment le plus ancien de la commune. Construite à la fin du XIIIe siècle, cette église de style gothique a été profondément remaniée au XIXe siècle puis restaurée et embellie ces dernières années. 

Construction – Restauration

Le nom des fondateurs de l'église Notre-Dame-de-la-Visitation est connu par un acte notarié passé en 1493 devant Denis Godin, tabellion (notaire adjoint) à Melun. Les religieux du prieuré Saint-Sauveur, à l'époque propriétaire de l'église, déclarèrent qu'ils n'en étaient pas les fondateurs et refusèrent donc d'effectuer les réparations de l'église, comme en témoigne l'inscription d'une pierre tombale située à gauche de l'autel et représentant une femme en habit de demoiselle : « Icy gist Evambor, fille de Jean Limoges et de Félice, sa femme, qui fondèrent cette église. » Conservée dans la crypte, cette pierre tombale n'est malheureusement plus visible.

On ne sait rien sur les transformations entreprises entre le XVe et le XIXe siècle. À partir de 1840, et jusqu'en 1860, grâce à la générosité de Marie Moreau de La Rochette, de sa sœur Élisabeth et de M. Barré de Saint-Venant, d'importants travaux de restauration furent entrepris, lui donnant l'aspect qu'elle a aujourd'hui. L'église rénovée fut ouverte au culte et bénie en 1888 par Monseigneur Briey, évêque de Meaux.

De 1980 à 1983, la municipalité a entrepris de nombreux travaux de réfection et d'embellissement de l'église : restauration du clocher, remplacement du parquet de la nef par un dallage de pierre, et remplacement des vitraux.

En 1992, grâce à l'aide du Conseil général de Seine-et-Marne, les statues et médaillons ont été entièrement restaurés : ils ont retrouvé leur aspect d'origine.

Description

Le chœur date de la fin du XIIIe siècle.

La voûte est soutenue par une croisée d'ogives dont les arêtes reposent sur des modillons (ornements saillants) grossièrement sculptés, formés de têtes humaines, qui ont été coupés au XIXe siècle. À la croisée des ogives, on peut voir un visage sculpté dans la pierre, celui du fondateur de l'église, Jean Limoges.

Cette voûte a été peinte en bleu parsemé d'étoiles dorées au XIXe siècle.

Dans la nef, demeurent encore les murs et les fenêtres en arcs brisés du XIIIe siècle. Le plafond en bois de châtaignier du XIXe siècle a été refait à l'identique en 1990.

Les belles boiseries à décor néo-gothique « en plis de serviette » qui garnissent l'église, ainsi que les stalles et l'autel, ont été réalisées en 1857.

Les deux autels latéraux datés du XVIe siècle sont dédiés à saint Vincent et à la Vierge Marie.

Le porche et le clocher ont été reconstruits en 1843 en pierres meulières rouges et blanches avec encadrement de briques rouges. (Les pierres meulières sont des pierres calcaires siliceuses propres à faire des meules pour écraser les grains.)

On retrouve ces matériaux dans la construction de la maison du régisseur et de la ferme du château. Sous le porche, à droite de l'entrée, se trouvent les fonts baptismaux qui, par leur forme massive, peuvent être datés du XIIIe siècle.

Cette église a toujours été connue sous le nom de Notre-Dame de la Visitation. C 'est pourquoi le retable néo-gothique est décoré d'une peinture sur toile, La Visitation, copie d'une œuvre de Sebastiano del Piombo (peintre vénitien du XVIe siècle contemporain de Michel Ange), réalisé par M. Frisch dont l'atelier se trouve à la ferme d'Arvigny, au nord de Melun. Cette œuvre a remplacé en 1995 une copie de L'Assomption de Poussin, très abîmée.

Deux statues de « Vierge à l'enfant » sont consacrées à Marie. L'une, en bois polychrome datant du XVIIIe siècle, se trouve dans le chœur, à gauche de l'autel. L'autre, en pierre, classée monument historique, est située dans la nef à droite.

Sur le mur gauche du chœur, on peut admirer un panneau de bois finement sculpté provenant d'une chaire (fin XVe – début XVIe). Il représente la Vierge entourée des symboles de son Immaculée Conception : jardin fermé, fontaine, lis, miroir sans tache, lune, étoile, image dérivée du Cantique des Cantiques.

En plus du culte de la Vierge Marie, un saint était particulièrement vénéré à La Rochette. Il s'agit de saint Vincent, patron des vignerons, dont la statue, datant du XVIe siècle, est à l'honneur dans la nef, à gauche. En effet, jusqu'au XIXe siècle, la culture de la vigne était importante. Un texte de 1383 mentionne la présence d'un pressoir à La Rochette. Le lieu-dit des Grouettes (terrain caillouteux propre à la culture de la vigne) témoigne encore de ce passé. (La rue des Grouettes est située près du stade.)

Les anciens vitraux losangés en verre blanc, décorés en leur centre d'une croix rouge, ont été remplacés en 1983 par de beaux vitraux très colorés sur le thème biblique de la création du monde : Adam et Ève dans le chœur, des plantes et des animaux dans la nef. Ils ont été réalisés par M. Defert, maître verrier à Auxerre.

Le cimetière

Aménagé au milieu du XVIIIe siècle, le cimetière dit « vieux cimetière » en a remplacé un plus ancien situé sur la place actuelle de l'église.

On peut y voir le monument funéraire de la famille Moreau de La Rochette, le caveau de la famille Bouvery dans une petite chapelle, celui de la famille Kayser-Charavay, anciens propriétaires du Rocheton, ainsi que le tombeau de M. Raulin, architecte, avec son portrait gravé dans la pierre.

Le château

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Édifice sobre, de belles proportions, d'une grande simplicité décorative, remarquablement situé sur le bord du plateau, le château domine la vallée de la Seine. Il fut construit de 1772 à 1778 pour François-Thomas Moreau, inspecteur général des pépinières royales.

L'architecte Victor Louis établit les plans du château. (« Architecte de Sa Majesté le roi de Pologne », Victor Louis travailla également à la construction du Grand Théâtre de Bordeaux de 1772 à 1780.)

Le château fut construit en grès retaillé provenant de la démolition des fortifications de Melun. Quant aux terrasses, ce sont des pierres du château de Melun qui servirent, des années plus tard, à leur construction.

À l'intérieur, on peut encore admirer, au rez-de-chaussée, le grand salon décoré de colonnes à chapiteaux, de guirlandes enrubannées de feuillages et de fleurs ponctuées d'angelots (inscrits à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques depuis 1977). Le bel escalier droit, classique, est orné d'un médaillon finement ciselé représentant peut-être Louis XIV. Une plaque de marbre rappelle aussi une visite de la Dauphine, fille de Charles X, en 1827.

A gauche du château, une petite chapelle fut construite en 1779 et bénie par le cardinal de Luynes, archevêque de Sens. Apposée sur l'un des murs, une plaque rappelle l'existence d'un châtelet antérieur au château actuel.

Le grand perron « descendait jusqu'à la Seine de 40 pieds (environ 13 mètres) par quatre révolutions doubles ». De chaque côté, des « carreaux de potager » étaient entourés de « plates-bandes plantées d'arbres fruitiers ou autres ». (Extrait des plans de Victor Louis.)

Face à l'entrée principale, la cour et les jardins furent aménagés autour d'un bassin agrémenté d'un jet d'eau. À droite s'étendait un grand potager et les pépinières et, à gauche, côté bois, furent construites des écuries et des dépendances.

Les bois, du château jusqu'à la route nationale, furent aménagés en parc : des allées et des ronds-points y furent tracés : allée Royale, route de M. Rousseau (Jean-Jacques Rousseau possédait une maison route de Fontainebleau à côté de la propriété de la Croix Saint-Jacques), sentier des Soupirs et le carrefour des Pince-Vents.

L'histoire du château s'est confondue, pendant près de deux siècles, avec celle de la famille Moreau de La Rochette et plus particulièrement avec celle de son membre le plus illustre, François-Thomas, né en 1720.

Issu d'une famille bourgeoise de l'Aube, son père l'avait fait entrer dans l'administration. Receveur des impôts, M. François-Thomas Moreau fit l'acquisition, en 1753, des fiefs d'Olibon et de Béthisy à La Rochette. Il acheta ces terres en friches et impropres à la culture, sauf à celles de la vigne.

À partir de 1760, il fit défricher son domaine. Pour mener à bien ce travail, il demanda à l'État de lui envoyer des orphelins et des enfants abandonnés recueillis dans les hôpitaux parisiens de Saint-Antoine et de la Pitié. Selon lui, « élevés à la campagne et au bon air, ils s'en porteraient mieux, s'y fortifieraient… » (extrait d'une lettre). Bientôt, plus de cent enfants de quatorze ans furent ainsi mis à disposition.

Profitant d'une ordonnance royale de 1766 qui prévoyait que « la propriété des biens incultes serait accordée aux hommes qui les défricheraient et les mettraient en valeur », il agrandit son domaine. Il fit aussi l'acquisition des bois d'Étrangle-Veau, possession de l'abbaye du Lys, vendus comme bien national en 1790. Une partie des terres fut mise en culture, l'autre plantée en bois. M. François-Thomas Moreau avait constaté que, sous une première couche de terre inculte et compacte, s'en trouvait une autre plus fertile que pouvait atteindre une grande lame de charrue (à cette époque, les paysans ne disposaient pas de lame assez longue pour creuser la terre profondément). Grâce à cette découverte et à l'utilisation d'engrais appropriés, il obtint des récoltes prometteuses et développa ainsi des plantations de pépinières d'arbres fruitiers et forestiers. Devant les résultats encourageants de ses cultures, M. Moreau décida de créer une école afin de donner aux jeunes une formation professionnelle d'horticulteur, paysagiste ou pépiniériste. (Cette œuvre est une application des idées philosophiques du XVIIIe siècle, siècle des lumières.)

En 1765, Louis XV accepta de subventionner l'école qui devint École royale d'agriculture. Nommé inspecteur général des pépinières du royaume, M. Moreau fut récompensé pour la création de cet établissement « centre et modèle de toutes les autres pépinières » : il fut anobli en 1768 pour bons et loyaux services. Il put ainsi ajouter à son nom celui de sa terre. Les pépinières du château furent chargées de livrer des graines et des plants aux autres pépinières du royaume et de répandre des espèces nouvelles. M. Moreau de La Rochette utilisa ses relations, dont Benjamin Franklin, pour s'en procurer et en fit même venir de pays lointains (mûrier de Chine).

De 1767 à 1780, les pépinières royales de La Rochette fourniront plus d'un million d'arbres à tige et trente et un millions de plants forestiers. Une partie servit notamment à reboiser les forêts de Rambouillet, Fontainebleau et Compiègne.

L'État s'est approvisionné à ses pépinières, mais aussi des clients privés.

En 1767, Voltaire fit des commandes pour son domaine de Ferney, pourtant situé dans l'Ain : « J'ai été très touché de votre amour du bien public. Celui qui fait croître deux brins d'herbe où il n'en croissait qu'un rend service à l'État. »

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Extrait d'une lettre de Voltaire

à François-Thomas Moreau, le 1er juin 1767

« Vous voulez, Monsieur, que j'ai l'honneur de vous répondre sous enveloppe de Monsieur le Contrôleur général, et je vous obéis. Il est vrai que j'avais fort applaudi à l'idée de rendre les enfants trouvés et ceux des pauvres utiles à l'état et à eux-mêmes, j'avais dessein d'en faire venir quelques uns chez moi pour les élever. J'habite malheureusement un coin de terre dont le sol est aussi ingrat que l'aspect en est riant. Je n'y trouvai d'abord que des écrouelles et de la misère. J'ai eu le bonheur de rendre le païs plus sain en dessechant les marais. J'ai fait venir des habitants, j'ai augmenté le nombre des charrues et des maisons, mais je n'ai pu vaincre la rigueur du climat… J'ai été très touché de votre amour du bien public. Celui qui fait croître deux brins d'herbe où il n'en croissait qu'un rend service à l'État. J'ai l'honneur d'être avec l'estime la plus respectueuse, Monsieur, votre très aimable et obéissant Serviteur. Voltaire. »

Extrait d'une lettre de Voltaire

à François-Thomas Moreau, le 4 octobre 1767

« … personne n'est plus persuadé et plus touché que moi du service que vous rendez à l'État en établissant des pépinières. Je voulus il y a trois ans avoir des ormes à Lyon de la pépinière royale, il n'y en avait plus, je plantais des noiers, des châtaigniers par lesquels je ne verrai jamais ni noix, ni châtaignier, mais la folie des gens de mon espèce est de travailler pour la postérité.

Vous êtes heureux, Monsieur de voir déjà le fruit de vos travaux, c'est un bonheur auquel je ne puis aspirer, mais je n'en suis pas moins sensible à la grâce que vous me faites.

J'ai l'honneur d'être avec bien de la reconnaissance, Monsieur, votre très humble et très obligeant serviteur. Voltaire. »

                De même, en 1799, Joséphine de Beauharnais écrivit, de Fontainebleau où elle possédait une maison, « au citoyen Moreau » pour lui commander « soixante-huit arbres fruitiers ».

Extrait d'une lettre de Madame Beauharnais

à Fontainebleau le 9 pluviôse an I.

« Je vous préviens d'avance citoyen que je pourrai vous en payer le prix que dans six semaines ou deux mois, mais vous savez que je tiens mes engagements. Je désire que nous puissions faire affaire ensemble, ayant toujours été satisfaite de celles que j'ay traitées avec vous.

Je suis charmée citoyen de trouver cette occasion de vous marquer mon estime. Salut et fraternité. Lapagerie Beauharnais. »

L'an I : 1re année de la République (1792-1793). 9 pluviôse : dans le calendrier révolutionnaire correspond au 29 janvier 1793. En cette période de Terreur, Madame de Beauharnais a supprimé la particule de son nom.)

Animé par les idées généreuses des Lumières, M. Moreau de La Rochette fit aussi distribuer des arbres fruitiers aux paysans (plus de 100 000 plants).

Voyant sa fortune s'accroître, il entreprend alors la construction d'un château à l'emplacement d'un autre plus ancien situé sur le fief d'Olibon.

En 1780, malgré un succès considérable, les pépinières royales perdirent leurs subventions, sous le règne de Louis XVI, à cause de la politique de restriction budgétaire menée par le ministre Necker. En treize ans, l'école d'agriculture aura formé 400 jeunes. L'activité de la pépinière continua néanmoins de fonctionner jusqu'en 1836 sous un statut privé.

 

Blason de la famille MOREAU de La Rochette

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M. François-Thomas Moreau d'Olibon, inspecteur général des pépinières fut anobli en 1768, il choisit pour blason l'écu : « Écartelé : aux un et quatre d'argent à trois têtes de Maures de sable tortillées (bandeau) d'argent ; aux deux et trois, coupés d'or sur azur à trois roses posées 2 et 1, les premières de gueule, l'autre d'argent. » Les têtes de Maures ne sont que le rappel du patronyme Moreau, variante de Maure, surnom pour désigner un homme « bien comme un Maure » ou venu de Saint-Maur. Les roses illustrent les activités horticoles.

En 1768, l'écu était surmonté d'un casque signe de noblesse. En 1810, Jean-Baptiste François Moreau ayant été fait baron d'Empire une couronne de baronnie remplaça le casque.

Quant aux deux lévriers dressés tenant l'écu, ils ne sont qu'un ornement extérieur, et ils ne font pas vraiment partie du blason.

Belles demeures du XIXe

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La petite Rochette

Située en bordure de la route nationale, à hauteur de l'entrée du village, cette propriété abrite un centre équestre depuis cinquante ans.

Cette belle demeure – presque un château – de pierre blanche, au décor sobre néo-classique a été construite en 1890 par M. Barré de Saint–Venant, capitaine de cavalerie.

À l'arrière, entourant une cour, des écuries et dépendances ont été bâties dès 1829 par M. et Mme de Chavagnac. Côté nord s'étend un grand parc.

Ce domaine fut ensuite la propriété de la marquise d'Étampes, puis du baron Séguier (époux de la fille de la comtesse d'Agoult) jusqu'en 1887.

Après la seconde guerre mondiale – de 1944 à 1946 – une partie des bâtiments servit de prison pour enfermer les anciens collaborateurs.

En 1950, le baron Séguier loua toute la propriété à M. Alexandre Anselin qui y installa le centre équestre Duguesclin et fit également un élevage de sangliers dans le parc (1954-1964).

En 1987, tout le domaine fut vendu et divisé, la commune de La Rochette acheta le pré et une partie du bois.

Depuis 1994, M. Hubert Anselin est propriétaire des bâtiments et d'une partie du parc. Le centre équestre n'a jamais cessé de fonctionner et s'est même agrandi.

Le Rocheton

À l'extrémité sud du village, à l'orée de la forêt, une ancienne maison bourgeoise entourée de dépendances et de bâtiments modernes s'élève au milieu d'un grand parc. Au début du XIXe siècle, la propriété appartenait à la famille La Rochefoucauld. En 1816, des religieuses de Saint-Joseph de Lyon s'y installèrent pour se consacrer à l'éducation des enfants et au soin des malades. Elles furent obligées de partir en 1904.

M. Bouvrie, notaire, en devint propriétaire, puis M. Kayser, directeur d'une institution privée à Paris. Durant la première guerre mondiale, il fit venir ses élèves : des jeunes gens qui préparaient le baccalauréat. Le Rocheton devint alors le cours « Kayser-Charavay ».

Jusqu'en 1940, il accueillit des jeunes de familles aisées.

En 1946, Le Rocheton a été acheté par l'UCJG (Union chrétienne de jeunes gens), centre international d'accueil.

La Maison Raulin

Au centre du village, notre regard est attiré par un grande maison construite en pierres taillées, décorée de frises de briques vernissées, dont l'architecture originale tranche avec les vieilles maisons briardes du XIXe siècle. De nombreuses et larges fenêtres éclairent ses façades.

Le corps de bâtiment central s'élève en une tour carrée.

Au dernier étage, une grande baie vitrée occupe presque entièrement le mur nord. Elle éclairait un atelier d'architecture et de peinture.

En effet, M. Gustave Raulin (1837-1910), qui fit bâtir cette maison, était architecte de la Ville de Paris.

Place de l'église du village

Sur le mur de l'église, deux plaques commémoratives rappellent le nom des victimes des guerres 1914-1918 et 1939-1945.